La Cause en bref
Les Causes en bref sont des courts résumés en langage simple des décisions rendues par écrit par la Cour. Ils sont préparés par le personnel des communications de la Cour suprême du Canada. Ils ne font pas partie des motifs de jugement de la Cour et ils ne doivent pas être utilisés lors d’une procédure judiciaire.

Renvoi relatif à la Loi sur l’évaluation d’impact
Informations supplémentaires
- Voir le texte intégral de la décision
- Date : 13 octobre 2023
- Citation neutre : 2023 CSC 23
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Décompte de la décision :
- Majorité : Le juge en chef Wagner a accueilli l’appel en partie, concluant que le processus prévu aux articles 81 à 91 de la Loi est constitutionnel, mais que le reste du régime est ultra vires. (avec l’accord des juges Côté, Rowe, Martin et Kasirer)
- Dissidence partielle : Les juges Karakatsanis et Jamal ont dit que la Loi et le règlement sont entièrement intra vires.
- En appel de la Cour d’appel de l'Alberta
- Renseignement sur le dossier (40195)
- Diffusion Web de l'audience (40195)
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Décisions des tribunaux inférieurs :
- Décision (Cour d’appel de l’Alberta) (en anglais seulement)
Sommaire de la Cause
La Cour suprême conclut que le régime fédéral d’évaluation d’impact est en grande partie inconstitutionnel.
Dans cette affaire, la Cour suprême s’est penchée sur la constitutionnalité du régime fédéral d’évaluation environnementale que prévoit la Loi sur l’évaluation d’impact adoptée par le Parlement en 2019. La Cour devait examiner la question de savoir si la Loi et un de ses règlements d’application outrepassent la compétence législative conférée au Parlement par la Constitution.
La Loi et le règlement établissent un régime complexe de réglementation et de collecte d’information comportant deux parties. L’une de ces parties, qui est énoncée aux articles 81 à 91 de la Loi, établit un processus d’évaluation d’impact applicable aux projets qui sont réalisés ou financés par des autorités fédérales sur un territoire domanial ou à l’étranger. Dans de tels cas, l’autorité fédérale concernée doit décider si le projet est susceptible d’entraîner des effets environnementaux négatifs importants. Dans l’affirmative, l’autorité fédérale doit décider si ces effets sont justifiables dans les circonstances.
L’autre partie du régime, qui se compose des autres dispositions de la Loi ainsi que du règlement, décrit les projets qui sont considérés comme des « projets désignés » visés par la Loi, et elle les assujettit automatiquement au processus d’examen fédéral.
Le lieutenant-gouverneur de l’Alberta a soumis deux questions concernant ce régime à la Cour d’appel de la province au moyen d’un renvoi — un renvoi est une procédure qui permet aux gouvernements de demander aux tribunaux de donner leur avis sur une question de droit. La première question demandait si la Loi était entièrement ou partiellement inconstitutionnelle au motif qu’elle outrepasserait la compétence législative conférée au Parlement par la Constitution (« ultra vires » est le terme juridique utilisé pour décrire une telle situation). La deuxième question demandait si le règlement était entièrement ou partiellement inconstitutionnel au motif qu’il s’appliquerait à des matières relevant entièrement de la compétence législative conférée aux provinces par la Constitution. La Cour d’appel de l’Alberta a conclu, à la majorité, que la Loi et le règlement étaient ultra vires du Parlement et, en conséquence, entièrement inconstitutionnels.
Le procureur général du Canada a interjeté appel de cette décision à la Cour suprême. Contrairement au gouvernement fédéral, qui peut soumettre des questions par renvoi directement à la Cour suprême du Canada, les gouvernements des provinces et territoires doivent d’abord soumettre de telles questions directement à leur cour d’appel respective. Cependant, les avis que rendent les cours d’appel provinciales et territoriales peuvent ensuite être portés de plein droit (automatiquement) en appel devant la Cour suprême, ce qui signifie qu’aucune autorisation d’appel (permission d’appeler) n’est nécessaire pour que la Cour entende ces appels.
La Cour suprême a accueilli l’appel en partie.
Bien que le processus établi aux articles 81 à 91 de la Loi soit constitutionnel, le reste du régime est ultra vires du Parlement et en conséquence inconstitutionnel.
S’exprimant pour les juges majoritaires de la Cour, le juge en chef Wagner a statué qu’il fallait répondre par l’affirmative aux questions soumises par renvoi : le régime fédéral d’évaluation d’impact est en partie inconstitutionnel. Bien que la constitutionnalité des articles 81 à 91 de la Loi n’était pas contestée, le juge en chef Wagner a précisé que le processus prévu par ces dispositions est constitutionnel. Toutefois, le reste du régime — soit la portion relative aux « projets désignés » — est ultra vires du Parlement et de ce fait inconstitutionnel pour deux raisons fondamentales. Premièrement, il ne vise pas à réglementer des « effets relevant d’un domaine de compétence fédérale » au sens de la Loi, parce que de tels effets ne dictent pas les fonctions décisionnelles du régime. Deuxièmement, la notion définie d’« effets relevant d’un domaine de compétence fédérale » ne cadre pas avec la compétence législative du fédéral. La portée excessive de ces effets exacerbe la fragilité constitutionnelle des fonctions décisionnelles du régime.
Le juge en chef a écrit ceci : « La protection de l’environnement demeure l’un des défis les plus pressants de notre époque. Pour relever ce défi, le Parlement est habilité à adopter un régime d’évaluation environnementale. Toutefois, le Parlement a également l’obligation de s’en tenir au cadre stable de partage des compétences énoncé dans la Constitution. » Il a en outre souligné « qu’il est loisible au Parlement et aux législatures provinciales d’exercer leurs pouvoirs respectifs sur l’environnement de manière harmonieuse, dans un esprit de fédéralisme coopératif », ajoutant que « les deux ordres de gouvernement peuvent faire preuve de leadership dans la protection de l’environnement et veiller au maintien de la santé de notre environnement commun ».